Le FUD (prononcer « feud ») est une expression qui correspond à une situation mais aussi une technique très employée en politique et dans les secteurs de l’économie, dont bien sûr celui de l’informatique. Ce serait même de là que vient l’expression…
Il s’agit pour un acteur du secteur de colporter auprès de ses « clients » des informations vagues à propos de la concurrence, « au conditionnel », souvent fallacieuses sinon erronées, pour induire chez eux de la peur —à commencer par celle du changement—, de l’incertitude et enfin semer le doute. La répétition permet à ces messages de mieux s’ancrer dans l’inconscient collectif…
Cet état d’inconfort fait alors fuir toute velléité de changement et pousse le sujet à rester « bien au chaud » dans un fonctionnement connu, nettement plus rassurant, même s’il n’est pas nécessairement adapté…
Un peu d’histoire
Dans les années 70, l’informatique était synonyme d’IBM. Bien sûr il existait des alternatives mais IBM était vraiment très loin devant ses concurrents. Un certain Gene Amdahl, employé d’IBM décida de voler de ses propres ailes et monta sa propre entreprise informatique directement concurrente d’IBM. C’est lui qui constata et dénonça à cette époque le FUD, ou Fear (Peur), Uncertainty (Incertitude) and Doubt (Doute) qu’exerçaient ses ex-collègues commerciaux d’IBM auprès de leurs clients, à l’égard évidemment des solutions qu’Amdahl proposait.
La technique du FUD consiste à dénigrer un produit ou un service concurrent, quand ce n’est pas directement une personne d’une société concurrente. Sa portée est d’autant plus marquante qu’elle s’adresse à un auditoire peu concerné ou néophite.
Matériels reconditionnés, logiciels libres, …
De nombreuses légendes urbaines du type FUD ont ainsi cours sur toutes sortes de sujets, les politiciens y sont abonnés, suivis comme leurs ombres (ou serait-ce l’inverse?) par le business, encore plus friand de FUD. Le marketing a ses grands gourous du FUD, beaucoup de pub vantant les mérites de « nouveaux » produits en sont des démonstrations.
Paradoxalement, le consommateur sera souvent plus circonspect devant un étalage d’arguments fondés et avérés qui devraient lui faire prendre conscience du bien fondé d’une démarche que face à des « à peu près » assénés d’une manière entendue…
Évidemment l’emploi prolongé de PC et autres matériels reconditionnés, un des piliers du fonctionnement d’i.d & l, est une cible facile du FUD. Si facile et ancrée qu’il n’est pas réellement nécessaire aux distributeurs (petits et grands) de forcer le trait, car le pli est déjà pris chez le consommateur.
En la matière, passablement technologique, peu de personnes ont les connaissances leur permettant d’aborder la question sereinement : un PC de 4 ou 5 ans est-il suffisamment :
- fiable : ne va-t-il pas me lâcher dans les mois prochains ?
- dimensionné : pourra-t-il faire fonctionner mes logiciels avec le niveau de confort que j’en attends ?
- évolutif : pourra-t-il faire fonctionner les logiciels dont j’aurai peut-être besoin plus tard ?
Bref, un peu trop d’incertitudes pour se lancer (même si chaque point peut-être résolu simplement) ! Avec une machine neuve, au moins j’aurai la paix !…
Paix toute relative, et au prix fort.
Le logiciel libre est également un beau sujet pour les praticiens du FUD. Microsoft ne s’en prive pas, osant comparer le coût d’un gros serveur Linux à un simple PC Windows, comme le montrait T.Nitot (Mozilla France) en 2004 dans son billet sur le FUD.
Ce FUD est colporté par ceux qui y ont un intérêt financier direct : Microsoft, Apple, les éditeurs de solutions logicielles propriétaires et les sociétés de distribution de ces solutions. Il est aussi pratiqué par des journalistes et des informaticiens plus ou moins compétents en la matière, notamment ceux qui s’y seront intéressés « il y a quelques années », ou encore ceux qui ont développé leur parcours professionnel sur des solutions propriétaires. Heureusement pas tous, mais il est beaucoup plus facile à quelques-uns de ternir une réputation qu’à un grand nombre de la dorer…
Les peurs, incertitudes et doutes sont alors mis sur :
- la convivialité d’utilisation : c’est différent de ce que vous connaissez, c’est à dire Windows ! Chaque version de Windows n’apporte-t-elle pas des différences ? Et Office 2007 par rapport aux versions précédentes ?…
- la sécurité de GNU/Linux, alors qu’on parle d’un système toujours exempt de virus, beaucoup plus sécurisé que Windows, à preuve les centaines de milliers de serveurs GNU/Linux dans le monde.
- la compatibilité des fichiers : vais-je pouvoir lire les fichiers qu’on m’envoie de Windows ou Mac ? Belle manipulation du concept : les logiciels libres s’appuient sur des formats de fichiers ouverts, compatibles entre logiciels, au contraire des formats des solutions propriétaires. C’est bien l’inverse qui se produit, le .doc du document Word, par exemple, est dédié à Word, heureusement exploitable avec LibreOffice (ou OpenOffice), alors que le format ouvert ODT l’est de tout traitement de texte digne de ce nom (même Word 2007 s’y est enfin mis…)
Mais là aussi « dans le doute je m’abstiens » et préfère une tranquillité apparente, au prix fort, du logiciel propriétaire quitte à accroître ma dépendance à cette technologie.
Quelques certitudes, pourtant…
Cependant des certitudes sur les sujets du matériel et des logiciels, il n’en manque pas !
A commencer par l’écart énorme qui existe entre l’empreinte écologique des phases de production, transport et traitement de fin de vie des PC par rapport à leur utilisation au quotidien : 48 fois plus de CO2 dégagé pendant ces phases comparées à 1 an d’utilisation en France. Autrement dit, acquérir un PC neuf contribue activement au changement climatique !
On peut y ajouter la raréfaction constante des matières premières nécessaires, matière qu’on ne recycle toujours qu’en très faible proportion quand la machine part à la benne… Le consommateur est le premier acteur de cette situation par son acte d’achat puis son acte de « poubellisation » !
Autre certitude : une grande majorité des utilisateurs de PC sont largement dimensionnées, voire nettement sur-dimensionnées par rapport à l’utilisation qu’ils en ont réellement. Ils acquièrent aussi des logiciels qu’ils n’utilisent simplement pas pour 10% d’entre-eux, et lorsqu’ils les utilisent n’en exploitent qu’un sous-ensemble de fonctionnalités, faute de connaissance et par manque de support à l’utilisation.
Dans une bonne proportion un PC de 4 ou 5 ans leur conviendrait parfaitement, mais la différence de prix ne leur paraît justifier ce choix, que sont quelques centaines d’euros pour un peu de « tranquillité d’esprit » ou encore pour pouvoir utiliser ces logiciels derniers cris toujours plus gourmands, toujours plus complexes…
Cette « tranquillité d’esprit » se paie au prix fort pour l’environnement et pour toutes celles et ceux, tous ages confondus, qui triment pour produire ces équipements électroniques !
Or un PC peut durer bien au-delà de 5 ans, il peut évoluer par le simple ajout de mémoire, d’un nouveau disque dur en remplacement ou en complément de celui d’origine (pour les « desktops »), par l’ajout de cartes ou d’accessoires d’interfaces qui pourraient être nécessaires.
Quelques logiciels libres couvrant les fonctionnalités réellement employées, permettant les échanges avec d’autres logiciels, y compris propriétaires, évolutifs et bénéficiant de communautés d’entraide actives sur le net, et le contrat est clairement rempli !
A lire sur le sujet
- Le « FUD » expliqué aux newbies (bUg <BR>Oth3r)
- Comprendre le FUD par la pratique (T.Nitot – Standblog)
Merci !
Les compliments sont si rares…À croire que bien peu de lecteurs de ce blog les estiment mérités ! 🙂
Oui, c’est à contre-courant d’un système aveugle (et aveuglant), pire : mortifère, mais depuis bientôt 6 ans que j’ai monté i.d & l, je m’entête à tenir ce cap.
Merci Merci.
Bonjour .
Enfin un site « en marge » du système .
Avec tout ce que cela implique de progrès! Car le progrès, le vrai, est bien à contre courant du progrès, le faux ! (Débrouillez vous avec les nuances ….)
Je recherche également les solutions pour acquérir les connaissances techniques pour aller vers l’autonomie .
Courage vous êtes des gens formidables !
Sincères et Cordiales salutations . Michel